Ce n’est que lorsque des étudiants(tes) perturbent la tranquillité habituelle de cette localité, et attentent ouvertement aux droits de la population , en bloquant carrément la circulation, sans le moindre sens de civisme, que l’habitant ordinaire se rappelle (ou apprend ) que l’ institution universitaire est « chez nous ».
Et pourtant , il ya déjà plus d’une décennie , c'est-à-dire au début des années 90 du siècle dernier, que l’Union Européenne avait financé et encadré un programme de réforme universitaire au Maroc, avec la création d’un réseau d’établissements appelés « Facultés des Sciences et Techniques », dont l’une des quatre premières fut implantée à Er-Rachidia. L’objectif visé était bien sûr l’extension de l’offre éducative ,mais surtout le développement de filières ouvertes sur les besoins et les interrogations des zones bénéficiaires du programme. Dans cette perspective, la F.S.T. d’Er-Rachidia était appelée à capitaliser le savoir sur le domaine semi désertique et oasien du sud atlasique (le volet sciences ), tout en contribuant, avec d’autres opérateurs, au développement des « techniques » adaptées, destinées à surmonter les contraintes écologiques au décollage des domaines semi- désertiques, comme le Tafilalet .( le volet techniques ).
La province des dattesdevait donc se féliciter d’avoir attiré pour une fois l’attention des décideurs, qui lui ont accordé un projet estimé alors à 14 milliards, avec un espace études et une cité universitaire. Er-Rachidia allait profiter des bienfaits liés à ce nouvel équipement socio-éducatif : accès à l’enseignement supérieur pour des couches modestes de la population – amélioration de l’environnement et des possibilités économiques grâce à l’apport technologique de l’institution – l’accueil de centaines de jeunes bacheliers(ières),tout prés de chez eux(elles), et en fin de compte, leur socialisation , pour en faire des « citoyens filalis authentiques» puis des citoyens marocains accomplis … Malheureusement, aux dires de ceux qui connaissent bien le dossier, « le ver était dans le fruit ».En effet, l’établissement est demeuré dans l’anonymat académique et scientifique, derrière ses remparts de forteresse, tournant le dos à son environnement immuable , et il faudrait user de loupe pour dénicher son impact sur le sort de la zone ; pire encore , les premiers dirigeants l’avaient condamné à être et rester, un « bocal » pour entretien et développement des virus du clanisme , de l’intolérance et de la négation de l’autre. Au lieu de constituer un foyer de rayonnement de savoir et de science, sur un territoire ravagé par l’analphabétisme et l’ignorance ,un creuset de civisme et d’intégration positive des jeunes amazighophones et arabophones ,l’institution est devenue « l’intrus par qui le scandale arrive » à ksar es souk,. Ya-il plus dramatique que les jeunes étudiants de cette contrée de savants et d’hommes pieux ,soient incapables de dialoguer et en viennent au meurtre ; au sein d’un espace censé parachever leur éducation à la citoyenneté, à la différence et aux droits fondamentaux ?
Au travers de l’histoire sanglante et des guerres de religion que l’Occident a vécu, l’Université n’est-elle pas restée cet univers « merveilleux » qui entretenait les grandes valeurs universelles, depuis Cordoue et Tolède en Andalousie, où brillaient jadis les savants musulmans, juifs et chrétiens , jusqu’à la Sorbonne française ?.Ya t il plus révoltant que les étudiants passent le plus clair de leur temps à piéger un directeur « rapace » qui se plaisait à détourner leur nourriture ?
Toute la population concernée ici connait la « siba » organisée que vit cet établissement , en proie au « nomadisme » du corps professoral, à des luttes intestines pour des motifs incroyables, devant le silence ou l’insouciance des responsables officiels concernées .Et , avec une seconde unité dont les chantiers demeurent interminables et l’encadrement indigent (la F.P.E), le noyau universitaire d’ici mettra bien du temps à germer , pousser , grandir et donner les fruits escomptés. Le semblant de rayonnement scientifique que l’institution semble retrouver ces derniers temps ne trompe que les moins avertis, un audit rigoureux révélerait la gouvernance « exemplaire » et l’usage fait des deniers publics. L’unité de mise en bouteilles de gaz au voisinage de cette « Bastille » avec sa nouvelle façade métallique, semble bien plus utile à la population besogneuse et résignée de Ksar es Souk.
Si l’Union Européenne nous a généreusement offert un établissement pour combattre le sous développement dans cette zone reculée, les nôtres ont réussi à en faire un « cadeau empoisonné », voilà notre bel exploit !!
Nous nous permettons de conclure, avec amertume, que les bienfaiteurs perdent leur argent, leur savoir, et leur savoir-faire. La « malédiction » semble ne plus vouloir nous quitter….il nous faudrait un « formatage » culturel profond , dont le logiciel n’est pas encore mis au point.
A.Mehdaoui – observateur local